Cet article analyse, d’une part, le travail d’intermédiation locative, de soin et d’accompagnement à domicile à destination de personnes atteintes de troubles psychiques graves et, d’autre part, les difficultés d’appropriation de l’habitat vécues par ces personnes. Cette analyse s’appuie sur une enquête de terrain réalisée dans une métropole française au sein d’une équipe chargée d’accompagner des patient·es psychiatriques vivant dans des logements accompagnés, une structure combinant l’offre d’habitat aux soins et à des interventions socioéducatives. L’article montre que, si cette équipe cherche à « sécuriser » les cohabitations en essayant de prévenir et de réguler des pratiques d’habitation jugées déviantes (isolement à domicile, incurie, squattage, consommation de drogues, par exemple), les résident·es expriment des sentiments d’insécurité (au sens d’instabilité) et des difficultés d’appropriation qui sont associés tantôt à leurs trajectoires résidentielles morcelées et vulnérables, tantôt à leurs conditions de vie et d’habitation (précarité économique, surveillance de leurs modes de vie, incertitude quant à leur avenir en matière de logement). La prise en compte du point de vue des personnes concernées permet de voir comment des pratiques supposées favoriser l’inclusion sociale, dans et par le logement, de personnes stigmatisées peuvent en vérité organiser des mécanismes de régulation et de contrôle de leurs modes de vie à domicile, de leurs pratiques de mobilité quotidienne et, in fine, de l’exercice de leur citoyenneté.
EN SAVOIR PLUS / https://www.erudit.org/fr/revues/lsp/2021-n87-lsp06905/1088101ar/
21 juillet 2022
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dans ETUDES
L’appropriation de l’habitat à l’épreuve de l’accompagnement en santé mentale : le cas des personnes vivant en logement accompagné en France